Lorie Fleury
6ᵉ année, Déléguée, Ogme
Fin mai 2016
Tous les samedis, la petite Lorie devait suivre ses cours particuliers. Une routine similaire aux autres jours de la semaine. Il n'y avait aucune exception, pour les Fleury la fin de semaine marquée par le samedi et le dimanche n'était ni plus ni moins qu'un jour comme les autres, que cela soit un lundi ou un jeudi. Bien évidemment, elle ne se doutait pas que la plupart des autres enfants ne travaillaient pas le samedi et encore moins le dimanche. Comme lorsqu'elle devait jouer de la harpe, elle ne se posait pas de question. C'était devenu sa routine quotidienne et c'était normal de passer ses jours entiers à alterner entre les professeurs. Ce jour-là, elle était loin de se douter, du haut de ses huit ans, que son père était revenu au domaine. Il fallait dire que cela relevait du miracle de le voir une troisième fois dans le mois. Enfin le voir... Lorie savait qu'il était rentré durant la journée, mais ce n'est pas pour ça qu'elle l'avait vu durant la pause déjeuner ou même entre ses cours.
Lorie était en train de travailler avec sa professeure de français, lorsque la porte du salon s’ouvrit. C’était madame Louise. Toujours impeccablement habillé, son regard sévère d’un grand sérieux et ses manières trahissant une éducation au moins aussi stricte que celle de Lorie. Lorie était en train de travailler sur un livre qu’elle trouvait pompeux, d’un ennuie qui demandait à sa professeure de toujours être derrière elle afin qu’elle reste concentrer pour ne pas se distraire avec les échecs. Le silence s’était installé alors que Lorie devait répondre à différentes questions vis-à-vis du livre. Rompu par la voix aigüe de madame Louise.
« Je suis navrée, mais je dois vous emprunter mademoiselle Lorie. » Un silence s’installa.
Un peu étonnée la professeure de Lorie essayait de comprendre ce qui pouvait être si important pour interrompre son cours. Cela ne pouvait-il pas attendre ? Après un questionnement poli de sa part la réponse de madame Louise, bien que très claire était peu satisfaisante pour la professeure de langue.
« Monsieur Fleury souhaite s’entretenir avec sa fille, celui-ci n’aime pas attendre. »
Dans un petit mouvement d'approbation la professeure de Lorie libéra celle-ci afin qu'elle suive madame Louise. Elle descendit de la chaise avec élégance, s'inclina envers sa professeure dans une petite révérence respectueuse, puis emboîta le pas derrière madame Louise. Une fois devant le bureau de son père, sa préceptrice frappa à la porte et attendit qu'on l'invite à rentrer. Pendant la durée de l'attente, madame Louise en profita pour arranger les quelques mèches qui sortaient de son chignon du matin. Elle tendit aussi le tissu de la robe quelque peu froissée de la petite française. Une fois fait madame Louise ouvrit la porte et laissa Lorie entrer en l'annonçant.
« Mademoiselle Lorie, Monsieur Fleury. »
Lorie Fleury
6ᵉ année, Déléguée, Ogme
Louise referma la porte aussitôt et laissa la petite Fleury avec son paternel. Lorie s'avança jusqu'au bureau. D'une posture droite elle attendait les éventuelles consignes de celui-ci les mains jointes devant son petit corps. La petite blonde était contente d'être un peu debout, ses jambes avaient tendance à s'engourdir lorsqu'elle restait trop longtemps assise. Ce qui était le cas presque tous les jours. Le visage sérieux de monsieur Fleury était capté par des documents qui semblaient non-magiques à première vue. Pour une raison obscure il avait un intérêt pour certaines disciplines qui leur étaient propres. Ses cheveux mi-long s'agitaient quand il releva la tête afin d'observer sa fille.
« Bien… Sais tu pourquoi je voulais te voir ? »
Lorie prit le temps de réfléchir. Aux vues de la période elle avait une idée plus ou moins précise du pourquoi elle se trouvait dans ce bureau, devant son paternel, prête à recevoir une flopée de consigne au vu d'une sortie.
« Le grand-prix de Monaco père ? » Répondit la petite blonde qui avait eu droit à celui-ci l’année dernière.
« Garde cette perspicacité… Monsieur Fleury se leva et se mit à marcher en direction des fenêtres. En effet demain toi et tes sœurs m’accompagnerai au grand-prix. Sais-tu ce que cela signifie ? »
« Qu’il est nécessaire d’être irréprochable père »
Monsieur Fleury se tournait alors vers sa fille à nouveau. Son air était encore plus sévère qu'il y a quelques instants. Lorie avait presque l'impression qu'il allait la punir pour une raison obscure ou totalement arbitraire.
« Exact, mais ce n'est pas tout. Il marqua un silence. » Comme tu dois le savoir c'est un événement non-magique, cela signifie que tu devras faire davantage d'effort pour te tenir toi... et ta langue. J'attends plus qu'un comportement irréprochable. De plus, comme tu as huit ans et que ta mère ne peut m'accompagner sur cette édition et ta sœur étant à l'académie, tu devras t'occuper d'Elina et Pensée. Si j'apprends qu'il y a eu un seul petit écart de conduite je devrais agir en conséquence. Un silence se posa, Lorie n'étant pas invitée à parler elle se tut afin d'attendre la suite. Je vais faire annuler tous tes autres cours du jour, y compris les échecs. Jusqu'à ce soir, tu apprendras l'intégralité des équipes, le nom des compétiteurs, leurs histoires, ainsi que toutes les informations sur le fonctionnement du championnat. Il est hors de question que tu passes pour une inculte auprès des autres. C'est compris ? »
Lorie cacha sa déception pour son cours d'échecs, elle n'en avait strictement rien à faire de ce championnat et encore moins de la vie de ceux qui y faisaient compétition. Néanmoins, elle se contenta de rester droite avec une posture convenable comme on lui avait appris.
« Oui père… »
Sa voix était claire, si elle pouvait tromper son père, madame Louise aurait tout de suite remarqué que ce « oui » était très loin d’être sincère. Le paternel de la petite blonde prit un gros tas de dossier et les posa devant sa fille sur le bureau. La pile était relativement conséquente.
« Bien tu peux disposer »
Lorie Fleury
6ᵉ année, Déléguée, Ogme
Lorie porta comme elle pouvait la pile de document qu'elle devrait étudier afin d'être prête pour le lendemain. Alors qu'elle parcourait les couloirs, les bras chargés en suivant sa préceptrice, elle se rendit compte qu'elle ne devait surement pas être la seule à avoir cela. Elle verrait tout cela en compagnie d'Elina. Le lendemain elle fut réveillée par madame Louise. Les mêmes phrases et les mêmes mouvements de celle-ci était presque un cauchemar à écouter et regarder tant c'était identique. Toutefois, alors qu'elle asseyait de lever son petit corps pour s'asseoir sur son lit, sa tête encore dans la brume, des nouvelles phrases firent leur apparition.
« Mademoiselle Lorie, aujourd’hui vous mettrez la robe blanche, Elina aura une robe lavande et Pensée une robe violette, de plus vou… »
« Si Rose n’était pas à l’académie elle aurait eu une robe rose ? C'est un peu ridicule… »
La réponse de madame Louise fut sèche, non seulement elle n'avait pas apprécié que la petite blonde lui coupe la parole, mais également le ton et les mots qu'elle avait utilisés. Après avoir asséné une bonne gifle à Lorie elle reprit calmement.
« Ce n’est pas parce que vous partez toute la journée que je vais oublier ce que vous venez de faire et de dire. Maintenant allez-vous préparer et que je ne reprenne pas une fois de plus votre insolence. »
La petite Fleury s'exécuta, se tenant la joue rose qui brulait pour donner suite à la sanction qui venait de tomber. Elle finit de se préparer et ce n'est qu'une fois coiffée qu'elle descendit dans la salle à manger. Son père était assis en bout de table, tandis que ses sœurs étaient à leurs places habituelles. Lorie prit place en silence. Elle vit son paternel sortir une montre à gousset en or sertit de nombreux diamants. Seulement quelques secondes passèrent avant qu'il ne la range à nouveaux.
« Cinq minutes de retard… Son regard était sévère, son visage fermé. Pourquoi tu as une joue plus rouge que l’autre ? »
« La température de l’eau m’a surprise père… »
« La température de l’eau hmm… Monsieur Fleury appela quelques domestiques du domaine dont madame Louise. Quelques jours dans la chapelle devraient lui laisser le temps de réfléchir sur sa façon de s'adresser aux autres et ses mensonges grotesques. Sortez la d'ici je ne veux plus la voir et encore moins lui faire le plaisir de l'emmener en dehors du domaine. Il marqua une pause. Oh !... Si par mégarde elle décide de pester ou se plaindre le maléfice du Cadenas devrait faire l'affaire. »
Sans broncher, Lorie accompagnée de madame Louise se mit en route vers la chapelle. Une fois à l'intérieur madame Louise verrouilla la porte. Lorie souffla, la bonne nouvelle c'est qu'elle ne devrait pas se rendre à ce championnat débile surtout sous cette pluie battante, la mauvaise c'est qu'elle s'ennuierait sans aucun doute un bon moment ici, toute seule. Le plafond était si haut, d'un bleu royal avec des décorations argentées. Les vitraux étaient encadrés par des dorures sur les mouluturations, les chapiteaux et les clés de voûte. Marquée par l'ennuie d'un tel lieu Lorie faisait les cent pas avant de finalement s'allonger sur le marbre blanc en plein milieu de la pièce. Le temps paraissait long et la journée interminable, le son de la pluie sur la toiture de la chapelle rendait le lieu encore plus ennuyeux. Lorie s'ennuyait tellement qu'une fois le soir arrivé elle put apercevoir les pétales des fleurs présentes dans son lieu de punition voleter au-dessus du sol, formant un ballet presque totalement orchestré d'une beauté bien plus intéressante que le rien qui était là pour la ronger. Elle avait de plus en plus hâte de se rendre à l'académie pour enfin sortir du domaine familial sans ceux qui étaient responsables de son éducation. Cette chapelle était paradoxalement plus proche des enfers que du paradis pour la petite blonde qui dormirait sans nul doute ici au moins cette nuit.
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